vendredi 11 mai 2012

8 règles de Kurt Vonnegut pour écrire une nouvelle ou une histoire courte

Photo de Kurt Vonnegut, célèbre écrivain américain.
Kurt Vonnegut, écrivain américain, nous donne des conseils pour écrire une nouvelle.

Lui, c’est Kurt Vonnegut, auteur américain de science-fiction.

En 2007, il laisse derrière lui une riche bibliographie, faite de romans, de pièces de théâtre et d’essais.

Dans son recueil de nouvelles, Bagombo Snuff Box, Vonnegut établit 8 règles pour l'écriture d'histoires courtes.

8 règles que je vous propose aujourd’hui de découvrir.

8 règles d’or pour écrire des histoires courtes ou une nouvelle


1. Utilisez le temps d'un parfait étranger de telle sorte qu'il ou elle ne pensera pas avoir perdu son temps.


De manière plus simple, ne gâchez pas le temps des lecteurs. Si vous arrivez à les convaincre de lire votre texte, alors faites en sorte que leur temps soit bien investi.

Nous sommes tous d’accord qu’une histoire courte, mais maîtrisée est préférable à un récit long et incohérent. La qualité prime la quantité. Souvenez-vous TOUJOURS de ça !

2. Donnez au lecteur au moins un personnage auquel s’identifier.


L’identification crée de l’empathie chez le lecteur, l’invitant à participer davantage dans l’histoire. C’est connu !

On mise souvent sur ce processus d’empathie pour lui transmettre des sentiments forts, mais surtout, de le faire adhérer à une œuvre.

Pourquoi certains livres ou films font-ils vivre à un personnage « normal » des situations extraordinaires ?

Pour fidéliser un public cible que ce soit des adolescents (dans le cas d’un film d’horreur, par exemple) ou des célibataires (pour un roman d'amour)...

C’est aussi un moyen de faciliter son entrée dans votre univers. Pour ce faire, proposez à vos lecteurs des personnages qui leur parlent, qui leur ressemblent.

3. Tout personnage doit vouloir quelque chose, même si ce n'est qu'un verre d'eau.


Votre personnage est sympathique, aux yeux du public. C’est bien ! Mais, s’il n’a aucune raison d’être dans votre histoire, il n’a aucune consistance.

Chaque personnage doit posséder des raisons valables d’en faire partie. Une motivation, un objectif, un désir...

Ses actes doivent être justifiés. Les antagonistes sont souvent plus intéressants que les protagonistes, car ils sont mus par une volonté forte.

L'Harmonica dans Il était une fois dans l'Ouest, film de Sergio Leone 1968.
Il a beau être taciturne... Mais, l'Harmonica a un but ! (Il était une fois dans l'Ouest)

4. Chaque phrase doit faire l'une de ces deux choses : définir un personnage ou faire avancer l'histoire.


Une nouvelle est un récit court, bref. Vous ne devez pas y étaler votre vision du monde.

En général, elle est centrée sur un seul événement. De même, les personnages, peu nombreux, sont moins développés.

Évitez au maximum les passages inutiles qui n’apportent rien à votre récit. Les dialogues sont aussi concernés.
« Il avait le visage du chauffeur de bus au visage calciné, brûlé par des heures de trajet. »
Par exemple, cette phrase me semble plus pertinente qu’une description détaillée.

Allez vers l’essentiel !

5. Commencez le plus près possible de la fin.


Ne commencez pas votre nouvelle par une longue scène d'exposition où vous présentez l’ensemble de votre intrigue et de vos personnages.

N’est-il pas plus judicieux de les mettre directement dans le feu de l’action ?

Primo, vous pourrez fournir de façon progressive les informations nécessaires à la compréhension du lecteur. Secundo, vous l’incitez à être plus attentif, au vu de son retard.

Tertio, l’utilisation d’astuces narratives telles que les analepses ou les prolepses n’en sera que plus judicieuse. Enfin, si vous désirez maintenir la tension dramatique !

6. Soyez sadique. Peu importe la gentillesse ou l'innocence de vos personnages principaux, faites-leur vivre des choses horribles pour que le lecteur voie de quoi ils sont faits.


Poussez vos personnages à leurs derniers retranchements. Je suis plus intéressé par un personnage qui rencontre des obstacles qu’un pantin sans vie s’y extrayant sans difficulté.

Montrez-nous leurs différentes facettes, leurs mauvais côtés, leurs faiblesses. Donnez-nous la chance de nous inquiéter pour eux. De la nuance, par pitié !

7. Écrivez pour une seule personne. Si vous ouvrez la fenêtre et que vous faites l'amour au monde entier, votre histoire attrapera une pneumonie.


Écrire pour le succès est la meilleure solution pour produire de la mauvaise fiction.

Ne cherchez pas à appauvrir votre œuvre, en suivant des règles prédéfinies, dans le seul but d’accéder à un marché populaire.

Le résultat obtenu ne serait qu'un livre formaté, caricatural au possible. Stephen King avoue écrire pour lui-même.

Ça peut paraître égoïste ; cependant, votre plaisir passe en premier. Écrivez ce que vous aimeriez lire.

Je peux vous assurer que les nouvelles intimistes de Stefan Zweig m’ont plus marqué que n’importe quel best-seller. (J’exagère !)

En tous cas, restez honnête et surtout soyez vous-même !

Homme regardant tristement une fenêtre.
Voilà ce qui arrive lorsqu'on ouvre la fenêtre...

8. Donnez à vos lecteurs le plus d'information possible aussi vite que possible. Au diable le suspense. Les lecteurs doivent comprendre parfaitement ce qui se passe, où et pourquoi, pour qu'ils puissent finir l'histoire eux-mêmes, au cas où les cafards mangeraient les dernières pages.


Dans une nouvelle, priver le lecteur d'informations est un moyen pour amener une chute. Or, c’est LA solution de facilité !

Ne soyez pas mauvais joueur et donnez-nous un maximum de contexte. Bien sûr, inutile de tomber dans l’excès.

L’accumulation de noms propres et de détails peut vite amener à la saturation.

À noter que si votre histoire est tellement bien écrite, il y a une grande chance que vos lecteurs se ruent pour s’offrir un pesticide. Dans ce cas-là, pensez à vous faire sponsoriser par Raid Anti-Cafards.

Mise en application


Personnellement, je ne suis pas d’accord avec toutes les règles notamment la 2 et la 8.

Par exemple, il est tout à fait possible de mettre en scène un protagoniste détestable dont la déchéance est proche, sans que le plaisir du lecteur en soit altéré.

De plus, certaines nouvelles finissent par une fin ouverte ou des questions en suspens. Et excellentes, de surcroît !

C’est à nuancer, bien évidemment. Les règles peuvent nous aider, même si elles ne détiennent pas la vérité absolue.

C’est pourquoi vous avez le droit de ne pas y adhérer à 100 % ! Rien ne vous empêche, par contre, de les suivre. Mais, si elles deviennent une contrainte, je dis NON.

D’ailleurs, je vous propose un exercice : écrire une nouvelle de 3 pages maximum. Vous devrez respecter TOUTES les règles énoncées par Kurt Vonnegut. Laissez-moi vous aider.
On l’appelait Filippo. Il venait, tous les samedis, dans notre quartier, boitant, levant sa canne en l’air. Parfois, il s’arrêtait, ses deux yeux porcins vous toisant. Et puis, il continuait sa route, silencieux. Au début, je ne m’en souciais pas vraiment ; pour être franc, ça m’était égal. Mais, voir ce vieillard poser sur vous un regard froid, glacial, chaque semaine, à la même heure, commença à avoir quelque chose d’effrayant. Qui était-il ? Que voulait-il ?
Les uns disaient qu’il était fou ; les autres parlaient d’un veuf sans histoire. Pourtant, personne ne connaissait sa véritable identité. La curiosité m’étreignait.
Voilà, OK, ce n’est pas du Zola ; néanmoins, cette introduction me semble être une base de travail honorable.

Les principales règles de monsieur Vonnegut sont prises en compte : le personnage principal est normal (il n’a rien qui le caractérise), son but est de découvrir l’identité de Filippo, etc.

C’est à vous maintenant de respecter les consignes. Comme je suis gentil (rires), je vous laisse le choix de vous en servir ou non.

En tout cas, je vous promets que cet exercice sera fructueux ; se fixer des limites est une étape INDISPENSABLE. Vous en tirerez bien plus de leçons qu’en me lisant.

J’accepte de recevoir et de commenter vos textes, bien sûr !

Pratiquez, pratiquez, pratiquez…

Bonne chance !

5 commentaires:

  1. c'est vraiment très intéressant ça va beaucoup m'aider merci beaucoup

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  2. Super, merci pour ce condensé d'astuces. Conseils très bien illustrés en plus.

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  3. On est en 2018 je commence ma premiere "chtite nouvelle" merci, pour cet article fait en 2012 etoujours tres #helpful.

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  4. Article intéressant ! Personnellement, je remettrais surtout en cause les règles 5 et 6.
    Commencer par un début in medias res, tout le monde le fait ; c'est certes un procédé qui a fait ses preuves mais on peut justement faire preuve d'originalité en commençant par une longue exposition. Pratchett commence certains romans de sa saga "Discworld" par une présentation de l'univers ou du lieu de l'histoire et c'est très réussi.
    On n'est pas obligé de faire vivre de l'extraordinaire aux personnages pour rendre la situation intéressante. La banalité de la vie quotidienne peut aussi intéresser : c'est le cas par exemple dans la nouvelle "Le parapluie" de Maupassant où l'action consiste seulement à se faire rembourser un parapluie mais montre toute la médiocrité d'une vieille bourgeoise qui persécute son mari par avarice.
    Comme tu le dis, ce sont de bons conseils mais il faut savoir les relativiser. :)

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